La ville de Khiva

La ville de Khiva

Khiva est une véritable ville-musée à ciel ouvert et un véritable trésor de l’architecture orientale, la ville des contes et légendes, minarets et madrassas. Les fouilles archéologiques ont montrés que Khiva existe depuis le Vème siècle avant notre ère. Située avantageusement sur les voies caravanieres, cette ville miraculeuse était en effet l’une des principales cités du Khorezm. Mais elle ne prit réellement sa place dans l’Histoire que vers le Xème siècle, sous le règne des Samanides. Au début du XVIIs. Khiva devint la capitale du Khorezm qui fut nommé par la suite le khanat de Khiva.

Khiva, mentionnée au Xème siècle dans les œuvres des voyageurs arabes Istakhriy et ibn Khaoukal, comme la 30ème grande ville du monde musulman, a accedé en 1967 au statut de musée à ciel ouvert. En 1990, 49 monuments historico-architecturaux sont inscrits sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO . Khiva est également inscrite comme la 100ème ville historique du monde.

Conformément à la tradition propre à l’urbanisme médiéval Khiva est divisée en ville intérieure ou Itchan- Kala, comptant plus de 40 monuments historiques et en ville exterieure ou Dichan-Kala, où les citadins vivent et travaillent.

L’architecture de Khiva frappe par ses formes monumentales, ses ornements d’une rare élégance, sa peinture extrêmement sophistiquée, la décoration originale des édifices de sa ville interieure.

Itchan Kal’a

Itchan-Kal’a signifie «ville intérieure». Sa disposition est typique de celle des villes médiévales en Orient. La surface occupée par Itchan-Kal’a correspond à celle qu’occupait Khiva vers le XVIIe siècle. Il s’étend sur près de 26 hectares, entouré d’une solide muraille munie d’échauguettes qui, tout en permettant de surveiller les alentours, étayaient la muraille. Elle est haute de 7 à 8 mètres, alors que son épaisseur au niveau du sol atteint 6 mètres. Itchan Kal’a, un long rectangle, s’élève au-dessus de la ville extérieure – Dishan-Kal’a, de 3 à 5 mètres: quatre portes sont situées aux quétre points cardinaux. Itchan-Kal’a était le lieu de résidence des khans; là se trouvaient les palais des souverains, les médersas, les mosquées, les minarets et les mausolées. L’artère principale, qui s’étire d’ouest en est, passe au milieu de la ville, reliant ainsi les principaux sites architecturaux. Ici fut utilisé le procédé architectural appelé kosh, traditionnel en Asie Centrale, qui consistait à bâtir deux monuments situés sur un même axe. A cause de la superficie réduite de la ville et de sa densité, les bâtiments étaient accolés les uns aux autres, s’évinçant parfois les uns les autres, mais formant en fin de compte d’intéressants et curieux ensembles architecturaux. Chacun d’eux possède son agencement propre, son histoire et son charme personnels.

La médersa et le minaret de Muhammad Aminkhan (1853-1855)

Construite entre 1853-1855, sous le règne de Muhammad Aminkhan, cet ancien séminaire islamique est l’une des plus grandes médersas d’Asie Centrale. A son temps, ses 125 cellules réparties sur deux niveaux accueillaient plus de 250 étudiants. Les tympans du haut portail ainsi que des deux étages de cellules de la façade sont décorés de motifs de majolique bleue. Aujourd’hui la médersa est devenue l’hôtel «Khiva» et peut accueillir plus de 130 touristes étrangers.

Une recherche de couleurs intense s’exprime dans la décoration de ce minaret court. De grands cercles, ou anneaux, composés de petites briques polychromes vernissées, le décorent donc sur toute sa hauteur.

Kalta-Minor devait devenir le plus haut minaret de l’Orient musulman, mais Muhammad Aminkhan, qui en avait ordonné la construction, ne revint pas à Khiva après une expédition militaire infructeure, et les travaux de construction du minaret s’arrêtèrent. Il existe une autre version des faits: l’émir de Boukhara, ayant entendu parler de l’existence d’un minaret extraordinaire, aurait persuadé en secret le mâitre qui l’avait créé d’ériger le même minaret à Boukhara. Le roi de Khiva, en l’apprenant, aurait ordonné de jeter le maître du haut du minaret. Quelle qu’en soit la version exacte, le minaret resta inachevé.

Kounia-Ark (XIIe-milieu du XIXe siècle)

Kounia-Ark, la «vieille citadelle», était la première résidence des khans de Khiva située à l’intérieur d’Itchan-Kal’a. Le plan de Kounia-Ark décrit un rectangle irrégulier s’étirant dans le sens nord-sud, le long de la muraille d’Itchan-Kal’a. La citadelle se compose de plusieures parties comme:

Kourinishkhana (1804-1806). Il s’agit de l’un des plus impotants édifices qui restent aujourd’hui; c’est là que se déroulaient les réceptions officielles. L’édifice, comportant de nombreuses pièces et de plan asymètrique, s’articule autour d’une petite cour entourée d’un mur à parapet découpé de créneaux. Les murs d’un aiwan à deux colonnes, disposé en saillie, sont entièrement recouverts de décor en majolique extrêmement riche. Les colonnes élancées sont faites en bois finement sculpté et posées sur des bases en marbre. La salle du trône de Kourinishkhana est décorée de gantch ciselé; dans le mur Sud a été pratiquée une niche où se trouvait autrefois le trône des khans de Khiva.

Le harem. Il fut construit sous le règne de Muhammad Rakhimkhan II (1865-1910). C’est un ensemble d’habitations avec une implantation périmétrale des bâtiments autour d’une cour rectangulaire. La partie Nord de la cour était occupée par un gynécée pour les concubines. Au milieu de la cour se trouve un bassin allongé dans le sens de l’axe.

La bastion Akcheikhbobo. Cette construction, qui fut appelée ainsi en l’honneur d’un cheikh particulièrement vénéré qui vécut là au XIVe siècle, était prévue pour la surveillance des alentours et le stockage de la poudre. Surplombant majestueusement la ville de Khiva, la bastion constitue encore aujourd’hui un excellent poste d’observation pour découvrir en perspective la ville et ses faubourgs qui s’étendent en contrebas.

La médersa de Muhammad Rakhimkhan II (1871)

Cette médersa a été érigée en 1871, par Muhammad Rakhimkhan II, l’un des illustres khans de Khiva. Son immense portail donne sur sa première cour entourée d’un étage de cellules. La construction suit le plan carré traditionnel mais se caractérise par un passage à voûte à 8 coupoles, le plus grand de Khiva. Aujourd’hui cette école coranique abrite un musée consacré à son constructeur, et une exposition relative au khanat pendant le XIXe siècle.

La mosquée Djouma (1788-1789)

Dans le monde musulman du Moyen Age, la renommée et l’importance d’une ville dépendaient de la présence d’une mosquée du Vendredi, destinée aux offices de ce jour qui rassemble de nombreux fidèles. Les gouverneurs de Khiva ont toujours accodé une attention particulière au perfectionnement architectural et artistique de cet édifice. Parmi les mosquées célèbres d’Asie Centrale, la mosquée Djouma de Khiva se distingue par son aspect traditionnel et archaique. Il s’agit d’une salle rectangulaire (45 m x 55m), recouverte d’un toit plat et garnie de nombreuses colonnes, avec une façade aveugle. La principale valeur artistique de cette mosquée réside incontestablement dans ces 213 colonnes ouvragées en bois, qui proviennent de différents endroits du Khorezm. Par conséquent, leurs dimensions, leurs formes, leur décoration et les époques de leur fabrication différent. Vingt-cinq d’entre elles sont très anciennes. C’est un véritable musée de colonnes des Xe-XVIIIe siècles.

A l’intérieur de la mosquée règne la pénombre, car les quelques ouvertures, en forme de lanternes pratiquées dans le toit, ne peuvent, et de loin, suffire à éclairer un bâtiment de cette dimension. La mosquée fut édifiée sur d’anciennes fondations datant approximativement du Xe siècle.

Le palais de Tach-Khaouli (1830-1838)

C’est l’un des plus importants édifices de l’architecture civile. L’architecture Nourmuhammad Tadjikhan fut bien puni pour avoir refusé de construire cet édifice grandiose en seulement trois ans; notons que, finalement, la construction du palais dura pendant encore huit ans. Le palais a la forme d’une figure trapézoidale irrégulière.

Extérieurement, il rappelle une forteresse avec ses murailles en brique cuite, ses portes d’accès fortifiées et ses tours. La structure intérieure du palais est divisée en une partie privée, le harem, et une partie publique: la salle de réception (ishrat-khaouli) et la salle des jugements (arz-khouli), . Tach-Khouli fut bâti en plusieurs étapes, ce qui se retrouve dans sa composition. Toutes les parties du palais sont isolées les unes des autres et chacune d’elles est munie de sa propre entrée. Les surfaces recouvrant les murs des courettes d’honneur intérieures témoignent de l’excellent niveau atteint par l’école artistique de Khiva et représentent une véritable synthèse de toutes les tendances de l’art monumental. La fine dentelle de l’ornementation en majolique, la gravure sur bois et une gamme de couleurs restreinte des fonds confèrent à la cour un aspect austère et solennel à la fois.

La médersa d’Allakoulikhan (1835)

Située juste en face de la médersa de Koutlimourad-Inak, la médersa d’Allakoulikhan la surpasse incontestablement par ses dimensions (62,5 m x 47 m) et la richesse de sa décoration. Elle fut construite sur une surface réduite, exigeant des achitectes beaucoup d’adresse et d’ingéniosité.

La composition volumétrique de la médersa reprend ce qui a pu être fait précédemment, mais ici on a intégré dans la décoration des façades les meilleures inventions de l’architecture du Khorezm du bas Moyen Age. L’architecture populaire de cette médersa a su, en respectant les formes et la distribution.traditionnelles, créer un monument élégant dans ses volumeset ses proportions. La fine majolique du portail et l’intérieur de la niche à arcs sont saturés de couleurs. L’aspect austère de la succession d’arcades le long de la façade principale est adouci par les lignes floues des motifs végétaux. Le portail est revêtu de panneaux en majolique parsemée d’ornements à caractère géométrique qui s’entremêlent sur un fond bleu soutenu; des inscriptions en arabe figurent sur les trois côtés du portail. On peut considérer la médersa d’Allakoulikhan comme l’un des plus beaux monuments de l’architecture du Khorezm du bas Moyen Age.

La médersa de Koutlimourad-Inak (1804-1812)

L’architecture de cet édifice combine le plan traditionnel d’une médersa à un étage avec la recherche de types d’architecture et de motifs décoratifs nouveaux. Les murs extérieurs aveugles, le portail massif, les tours d’angle fond penser à un bâtiment de défense, mais la belle décoration de la façade principale lui confère un air de gaieté.

Devant la médersa se trouvent des halles marchandes à voûtes, tandis que dans la cour il y a un grand réservoir d’eau souterrain recouvert d’une coupole (sardoba), qui fournissait l’eau aux habitants de la ville de Khiva. Les portails donnant sur la cour, dépourvus des aiwans d’été habituels, ont une vocation plutôt décorative. Les façades sont revêtues de briques cuites combinées habilement avec la majolique, bien qu’à cette époque son utilisation restait encore limitée.

L’ensemble devant la porte Polvon-Darvoza

Vers le milieu du XIXe siècle se créa dans Itchan-Kal’a, autour d’une petite place près de la porte Est, un centre administratif et commercial comprenant des édifices aux diverses fonctions. En faisaient partie les plus grands bâtiments de la médersa et de la mosquée Sayidniyaz Sholikor (XIXe s.), les bains publics d’Anoushah Khan et le caravansérail d’Allakoulikhan. Cette place était le noyau de la ville où étaient annoncés les ordres du roi et où avaient lieu les exécutions capitales. Immédiatement derrière les murs d’Itchan-Kal’a se trouvait le plus important marché d’esclaves de l’Orient.

Le minaret et la médersa d’Islam Khodja (1908-1910)

Le minaret d’Islam Khodja. On ne peut imaginer la ville de Khiva sans son minaret d’Islam Khodja, érigé au milieu de l’enchevêtrement des rues du centre d’Itchan Kal’a. Il occupe une place centrale, non seulement au milieu d’Itchan Kal’a, mais également dans toute la ville de Khiva. Sa hauteur est de près de 51 mètres. Mésurant près de 9 mètres de diamètre à sa base, le corps du minaret s’amincit considérablement dans sa partie supérieure, ce qui lui donne ce mouvement d’élan vers le ciel. Le haut est couronné d’une rotonde à coniche surmontée d’une petite coupole. Le minaret est divisé en tronçons concentriques dont la disposition entremêle des briques et des bandeaux en majolique. Les revêtements en carreaux sont particulièrement riches en couleurs près de la lanterne et de la corniche.

La médersa d’Islam Khodja. La médersa est de dimensions assez réduites. Le milieu de la façade principale est orné par un portail cantonné sur les deux côtés de loges à arcs et flanqué aux angles de tourelles-gouldastas. Les bandeaux en majolique et les tympans sont les points forts de la décoration. La courette est entourée de cellules. Dans l’un des angles s’élève une mosquée surmontée d’une coupole que jouxte à l’extérieur un minaret.

Le mausolée de Pakhlavan Makhmoud (XIVe-XIXe ss.)

La construction de cet ensemble commencée au XIVe siècle, fut réalisée à l’emplacement de la tombe de Pakhlavan Makhmoud, un poète et lutteur populaire de Khiva (1247-1325). On le considérait comme un saint et on lui prêtait le pouvoir de guérir.

A l’origine, cette tombe était surmontée d’un petit mausolée, puis un cimetière s’était constitue autour. Des traces de ces constructions primitives en brique crue subsistent à l’intérieur des murs des bâtiments qui ont été ajoutés plus tard. L’ensemble actuel n’apparut que bien plus tard, lorsqu’en sous le règne d’Allakoulikhan (1825-1842), débuta l’édification d’un nouveau mausolée autour de la tombe de Pakhlavan Makhmoud. Cet ensemble comprend, en plus de la tombe du poète, les sépultures d’Aboulgazi Bakhadir Khan, d’Anousah Khan et de Muhammad Rakhim Khan Ier. Dans la partie qui a été ajoutée au début du XXe siècle reposent les membres de la famille du khan. La remarquable porte sculptée du portail Sud donne sur une petite cour intérieure d’où l’on découvre le mausolée surmonté d’une coupole, posée sur un tambour; celle-ci est la seule de la ville à être de couleur turquoise. A sa droite,il y a un aiwan à colonnes, à sa guche, un bâtiment à un étage abritant les cellules, qui accueillent les lecteurs du Coran et les prédicateurs. Dans la cour se trouve un puits profond. L’intérieur tient le spectateur sous son charme par la magnificence de ses formes, par son aspect solennel et la débauche des couleurs. Dans le bandeau, au niveau des pendentifs, sont judacieusement incrustées de petites plaques circulaires comportant des vers de Pakhlavan Makhmoud.